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Saison Voltaire 2021 : "Les impostures" _ Volet 2

  • Mis à jour : 5 janvier 2021

LES IMPOSTURES ET IMPOSTEURS HISTORIQUES

MARTIN GUERRE, LE REVENANT

L’affaire Martin Guerre est une affaire judiciaire d’usurpation d’identité, jugée à Toulouse en 1560, qui a dès cette époque suscité un vif intérêt.

L’histoire  :

Au mitan du XVIème siècle, Marti, paysan d’Artigat dans le comté de Foix, s’embrouille avec son père pour une sombre histoire de vol de grain et quitte la région où il vivait, abandonnant sa petite famille les laissant sans nouvelles. Huit ans plus tard, débarque dans le village un type qui assure être Martin Guerre, de retour au pays, prêt à se réconcilier avec les siens. Et c’est vrai qu’il lui ressemble et qu’il a l’air de tout connaître du village. Mais entre-temps le père de Martin Guerre est mort et la question de l’héritage entre en ligne de compte pour déterminer s’il s’agit ou non du vrai Martin Guerre. On monte un procès pour tirer l’affaire au clair et, coup de tonnerre, à la dernière minute du procès apparaît le VRAI Martin Guerre, une jambe en moins…

Martin Guerre, dépose plainte contre Arnaud du Tilh qui a usurpé son identité pendant huit ans, trompant même son épouse, Bertrande de Rols. À l’issue d’une longue et complexe procédure judiciaire, Arnaud du Tilh est déclaré coupable et condamné à mort.

En 1561, Jean de Coras, l’un des magistrats instructeurs, publie le récit de l’affaire. L’ouvrage, sans cesse réédité, est à l’origine des travaux de l’historienne Natalie Zemon Davis. Alexandre Dumas l’évoque longuement dans le roman historique « Les Deux Diane » (1846)

Il n’en fallait pas moins pour que Daniel Vigne, nous fasse connaître cette histoire au travers du film « Le Retour de Martin Guerre » sorti en 1982. Magnifique interprétation des trois acteurs principaux :
- Gérard Depardieu : Arnaud du Tihl
- Nathalie Baye : Bertrande de Rols
- Bernard-Pierre Donnadieu  : Martin Guerre

GIUSEPPE BALSAMO (JOSEPH BALSAMO), DIT ALESSANDRO, COMTE DE CAGLIOSTRO

Nous arrivons maintenant dans le XVIII° siècle, avec des imposteurs et une imposture célèbre dont les actions allaient avoir des répercutions funestes.
Giuseppe Balsamo (Joseph Balsamo), dit Alessandro, comte de Cagliostro, est un aventurier italien, né à Palerme en Sicile le 2 juin 1743 et mort dans la prison pontificale de San Leo, près d’Urbino dans les Marches, le 26 août 1795.

L’histoire vraie
À peine sorti de l’enfance, il entre en 1756 au séminaire du couvent des Fatebenefratelli à Caltagirone, où il prend l’habit des frères de la Miséricorde, religieux soignants. Il y devient infirmier puis médecin.

Chassé de sa communauté d’accueil dès 1758 pour indélicatesses et escroqueries, il retourne à Palerme. Il est obligé de bonne heure de quitter sa patrie et parcourt de 1764 à 1767 sous différentes identités la Grèce, l’Égypte, l’Arabie, la Perse, Malte, Naples, Rome, et presque toutes les villes de l’Europe. Il acquiert de ses voyages la connaissance de quelques secrets alchimiques et médicinaux, et se fait une grande réputation pour des cures merveilleuses.

Le 21 avril 1768, il épouse à Rome Lorenza Feliciani, alias Seraphina, qui l’aidera dans ses escroqueries en séduisant les grands personnages que le couple rencontrait, faisant de Cagliostro un proxénète. Il rencontre Casanova à Aix-en-Provence en 1769.

De 1770 à 1776, il voyage en Europe (Madrid, Lisbonne, Londres, Paris, Venise, Naples, Bruxelles, Allemagne) et en Afrique du Nord. Le 12 avril 1777, à Londres, il est initié à la franc-maçonnerie dans une loge francophone, puis part pour Bruxelles.
De 1778 à 1783, il voyage à Venise (deuxième rencontre avec Casanova), Paris, Strasbourg, Saint-Petersbourg, Varsovie, Bâle. Il prend le nom de comte de Cagliostro.

Lorsqu’il arrive en France en 1780, il se fixe pendant quelque temps à Strasbourg, où il est reçu avec enthousiasme, puis se rend à Paris où il ne suscite pas moins l’admiration, devenant quelque temps à la mode dans la haute société. Il se présenta au public aristocratique comme un thaumaturge et un initié, et se place sous le patronage d’un grand seigneur, le cardinal de Rohan, prince-évêque de Strasbourg, grand aumônier de France, spéculateur averti, qui pressent le parti qu’il pourrait tirer du « mage ».

Cagliostro se prétend le disciple du comte de Saint-Germain, aventurier mystérieux, qui, à Versailles où il avait brillé vers 1750-1760, se déclarait immortel. Il affirme aussi posséder une eau de jouvence, sérum de jeunesse éternelle qu’il vend aux crédules. Il vend très cher différents élixirs, des pilules, fait des tours de magie et de sorcellerie, et il prétend avoir le pouvoir de faire apparaître les morts.

Son succès prodigieux dans la bonne société parisienne s’explique par sa personnalité, par la mode de la franc-maçonnerie mais surtout parce qu’il a derrière lui une demi-douzaine de gentilshommes qui spéculent sur les effets que ses pouvoirs produisent sur une société aristocratique fortunée et blasée. En 1785, la carrière de ce sorcier de salon est brisée par l’escroquerie connue sous le nom d ’affaire du collier de la reine dans laquelle il se trouve entraîné par le cardinal de Rohan.

Cagliostro au cinéma

Cagliostro a fait l’objet de 7 films :
- 1910 :

« Cagliostro, aventurier, chimiste et magicien »

film de Gaston Velle et Camille de Morlhon
- 1918 : “Cagliostro”, film de Ladislas Starewitch
- 1920 : « Der Graf von Cagliostro » de Reinhold Schünzel
- 1929 : « Cagliostro », film de Richard Oswald


- 1949 : “Cagliostro”, film de Orson Welles
- 1973 : « Joseph Balsamo » mini-série d’André Hunebelle
- 1975 : « Cagliostro » film de Daniele Pettinari

Sans compter les rôles de Cagliostro tenus dans les films ayant un sujet historique
J’ai retenu pour le film réalisé par Orson Welles et Gregory Ratoff en partie pour la très forte personnalité d’Orson Welles qui y tient le rôle principal.

Synopsis
L’histoire est un peu romancée. Le jeune gitan Joseph Balsamo voit sa mère mourir sous ses yeux, pendue injustement par un noble pour sorcellerie. Devenu adulte, il découvre qu’il a hérité d’un étrange pouvoir de persuasion qui lui permet de guérir des malades. Il décide d’utiliser ce pouvoir de l’hypnose pour son propre compte et prend le nom de Comte de Cagliostro…

Le film
Dirigé par Gregory Ratoff, Cagliostro est librement adapté d’une série de romans d’Alexandre Dumas père (principalement « Joseph Balsamo et Le Collier de la Reine »). Le film est très marqué par la présence magistrale d’Orson Welles qui a une grande présence dans ce rôle qui semble taillé pour lui ; c’est son premier film en Europe (il fut tourné aux studios Scalera en Italie) et c’est, selon ses propres dires, le tournage qui lui a procuré le plus grand plaisir de sa carrière. Il en a même dirigé quelques scènes. Gregory Ratoff se révèle être un bon conteur et se montre particulièrement habile pour mêler des éléments de comédie à l’aventure. L’ensemble captive et se montre plaisant.

L’IMPOSTURE DU COLLIER DE LA REINE

On ne peux évoqué Cagliostro sans évoquer son implication dans l’affaire du collier de la reine et parler de cette imposture qui valu bien des vicissitudes par la suite .
L’affaire du collier de la reine est une escroquerie qui eut pour victime en 1785 le cardinal de Rohan, évêque de Strasbourg, et éclaboussa la réputation de la reine de France Marie-Antoinette, épouse de Louis XVI. Elle ne pu réussir que par l’usurpation de l’identité de la Reine.

L’histoire

En 1772, Louis XV souhaite faire un cadeau à Madame du Barry. Il demande aux joailliers parisiens Bœhmer et Bassenge de créer un collier de diamants inégalable.

Louis XV meurt avant la livraison. Le paquet leur restant sur les bras il espère le vendre à la reine Marie Antoinette. En 1778, le nouveau roi, Louis XVI, souhaite lui offrir le collier, mais elle refuse. Après avoir vainement essayé de placer le collier en dehors de la France, les bijoutiers tentent une dernière fois de le vendre à Marie-Antoinette après la naissance du dauphin Louis-Joseph en 1781 mais la reine refuse à nouveau.

Les intervenants extérieurs

Arrivent alors, Jeanne de Valois-Saint-Rémy, comtesse de La Motte et son époux, Nicolas de La Motte. Jeanne en raison de son ascendance (Henri II) reçoit une pension. En 1780, Jeanne épouse à Bar-sur-Aube, un jeune officier, Nicolas de La Motte. Le ménage, peu après, usurpe le titre de comte et comtesse de La Motte.

À cette date, elle fait un voyage à Saverne, pour rejoindre Mme de Boulainvilliers qui lui présente son ami le cardinal Louis de Rohan-Guémené, qu’elle sollicite financièrement pour sortir de la misère, puis devient sa maîtresse. C’est là aussi qu’elle rencontre le mage Joseph Balsamo, qui se fait appeler comte de Cagliostro.
Mme de La Motte tente de se mêler à la Cour. Elle parvient à convaincre le cardinal qu’elle a rencontré la reine Marie-Antoinette dont elle dit être devenue l’amie intime. L’amant de Mme de La Motte, Louis Marc Antoine Rétaux de Villette (un ami de son mari), grâce à ses talents de faussaire, imite parfaitement l’écriture de la reine. Il réalise pour sa maîtresse de fausses lettres signées « Marie-Antoinette de France ». La comtesse commence ainsi d’entretenir une fausse correspondance, dont elle est la messagère, entre la reine et le cardinal.

La reine et le cardinal ont un vieux contentieux : en 1773, le cardinal, qui était alors ambassadeur de France à Vienne, s’était aperçu que l’impératrice Marie-Thérèse, jouait un double jeu et préparait en sous-main le démantèlement de la Pologne, de concert avec la Prusse et la Russie. Il avait écrit une lettre à Louis XV pour l’en avertir, lettre qui fut à la comtesse du Barry, favorite de Louis XV, détestée par Marie-Antoinette. La comtesse l’avait lue publiquement dans un dîner, or le ton de cette lettre était ironique et très irrespectueux envers l’impératrice, et prêtait à Marie-Antoinette un caractère volage.

Depuis ces épisodes, ce dernier se désespérait de cette hostilité. La comtesse de La Motte fit espérer au cardinal un retour en grâce auprès de la souveraine. Ayant de gros besoins d’argent, elle se fit remettre de grosses d’argent alors qu’elle lui procurait des fausses lettres de la reine, annonçant la réconciliation espérée, tout en repoussant indéfiniment les rendez-vous successifs demandés par le cardinal pour s’en assurer.

Le comte de la Motte avait découvert par l’entremise de Cagliostro qu’une prostituée exerçant au Palais-Royal, Nicole Leguay, que la Motte fait appeler Mlle d’Essigny ou baronne d’Oliva, s’était forgé une réputation due à sa ressemblance avec Marie-Antoinette. Mme de La Motte la convainc de bien vouloir jouer le rôle de la reine recevant en catimini un ami, dans le but de jouer un tour.

La nuit du 11 août 1784, le cardinal se voit confirmer un rendez-vous au bosquet de Vénus dans le jardin de Versailles à onze heures du soir. Là, Nicole Leguay « l’obligeante hétaïre », déguisée en Marie-Antoinette dans une robe de mousseline à pois (copiée d’après un tableau d’Élisabeth Vigée Le Brun), le visage enveloppé d’une gaze légère noire, l’accueille avec une rose et lui murmure un « Vous savez ce que cela signifie. Vous pouvez compter que le passé sera oublié

L’escroquerie
Le 28 décembre 1784, se présentant toujours comme une amie intime de la reine, elle rencontre les joailliers Bœhmer et Bassange qui lui montrent le collier de 2 840 carats qu’ils souhaitent rapidement vendre car ils se sont endettés pour le constituer. Tout de suite, elle imagine un plan pour entrer en sa possession.

Elle déclare au joaillier qu’elle va intervenir pour convaincre la reine d’acheter le bijou, mais par le biais d’un prête-nom. De fait, le cardinal de Rohan reçoit en janvier 1785 une nouvelle lettre, dans laquelle la reine lui explique que ne pouvant se permettre d’acquérir ouvertement le bijou, elle lui fait demander de lui servir d’entremetteur, s’engageant par contrat à le rembourser en versements étalés dans le temps — quatre versements de 400 000 livres — et lui octroyant pleins pouvoirs dans cette affaire. Le 1er février 1785, convaincu, le cardinal signe les quatre traites et se fait livrer le bijou qu’il va porter le soir même à Mme de La Motte dans un appartement qu’elle a loué à Versailles. Devant lui, elle le transmet à un prétendu valet de pied portant la livrée de la reine (qui n’est autre que Rétaux de Villette). Pour avoir favorisé cette négociation, l’intrigante bénéficiera même de cadeaux du joaillier.

L’affaire du coller de la Reine au cinéma

L’Affaire est le thème des films suivants :
- « L’Affaire du collier de la reine » de Marcel L’Herbier en 1946,
- « L’Affaire du collier de la Reine » de Guy Lessertisseur - INA - La caméra explore le temps en 1962.
- « L’Affaire du collier » (The Affair of the Necklace) de Charles Shyer en 2001,

Pour des raisons personnelles et pour la disponibilité des extraits de films sur Youtube, j’ai choisi le film de Marcel L’Herbier. Ce film qui retrace l’histoire a fait appel à des interprètes prodigieux :
Viviane Romance : la comtesse Jeanne de La Motte-Valois (qui n’a pas le regard d’escroc de Gaby Morlaix dans le film « Si Versailles n’était conté « de Sacha Guitry)

Maurice Escande : le cardinal Louis de Rohan
Marion Dorian : Marie-Antoinette, reine de France
Pierre Dux : Cagliostro, un mage bidon accusé à tort de l’affaire

Ce fut un énorme succès au box-office à sa sortie, le film est aujourd’hui complètement oublié. On comprend pourquoi : Le film a eu des moyens (costumes figurants…) mais souffre de son académisme, voire même au début d’une certaine confusion. Le réalisateur dans la première partie préfère insister sur l’ambiance de la cour (il y a d’ailleurs de fort jolis plans) plutôt que sur la précision de l’intrigue. De plus le rôle de Cagliostro joué par Pierre Dux frise le ridicule. Néanmoins la première heure du film reste tout à fait regardable d’autant que le charme de Viviane Romance fonctionne fort bien. Quand commence le procès, le film fait naufrage, la longue scène du procès est ratée tant sur la forme (il n’est qu’à comparer ce que font les américains en la matière) que sur le fond (on est jamais obligé de respecter la vérité historique mais il y a des limites tout de même…) quant aux dernières scènes : L’herbier en fait trop tirant son film vers la tragédie avec une lourdeur d’hippopotame.

Sur le sujet on regardera le film "l’affaire du collier" de Charles Shyer (2001) qui raconte la même histoire de façon bien plus intéressante.

LE CHEVALIER D’EON

S’il y a bien quelqu’un sur lequel on s’est interrogé sur ses apparences c’est bien le Chevalier d’Eon. Charles d’Éon de Beaumont , dit le chevalier d’Éon (5 octobre 1728, hôtel d’Uzès de Tonnerre - 21 mai 1810, Londres) est un diplomate, un espion, un officier et un homme de lettres français.

Son histoire
Il est resté célèbre pour son goût prononcé pour le travestissement. Ce qui a amené les contemporains à spéculer sur son identité sexuelle, devenue pour les auteurs anciens une énigme historique. En fait, un collège de médecins a constaté à l’autopsie qu’il était doté d’attributs masculins normalement constitués même si un autre examen, effectué de son vivant mais non dévêtu, était arrivé à la conclusion opposée.

Il a joué un rôle important dans la diplomatie officielle et surtout parallèle de Louis XV. Il a contribué à faire basculer la Russie dans le camp français au début de la guerre de Sept Ans. Puis, lors de son ambassade en Angleterre, il a élaboré, entre autres, un plan d’invasion du pays par la mer.

C’est l’un des personnages les plus brillants et les plus contradictoires du XVIIIe siècle : il vécut habillé en homme pendant quarante-neuf ans et en femme pendant trente-deux ans. Aimant la fête et la bonne chère, il a écrit des essais sur des sujets aussi divers que précis (par exemple : « Mémoire sur l’utilité de la culture des mûriers et de l’éducation des vers à soie » en France).

Le chevalier d’Eon au cinéma

En 1959, Jacqueline Audry réalise « Le Secret du chevalier d’Éon », avec Andrée Debar (tenant le rôle), Bernard Blier et Isa Miranda

« Beaumarchais, l’insolent », film d’Édouard Molinaro, avec Claire Nebout (tenant le rôle), Fabrice Luchini, et Sandrine Kiberlain évoquera le Chevalier ainsi que « Si Versailles m’était conté » dans un jeu amoureux d’un bal masqué.

Dans le « Le Secret du chevalier d’Éon » , la réalisatrice ne prend qu’une partie de la vie du Chevalier, jouant plus sur les sentiments amoureux que sur la vie mouvementée du héros. Le père de Charles d’Éon, pour ne pas perdre l’héritage de son vieil oncle est contraint de faire passer sa septième fille pour un fils. Celle-ci est donc élevée par son grand-oncle en garçon. Devenue un beau jeune homme, habile bretteur et cavalier, elle s’engage dans un régiment de dragons.

Elle rencontre alors la comtesse de Monval (Dany Robin) , une agente secrète du roi Louis XV. Introduite auprès du roi par celle-ci, elle est envoyée en mission auprès de la tsarine Élisabeth (Isa Miranda) pour renverser l’alliance entre la Prusse et la Russie. Aidée par Bernard de Turquet (Gabriele Ferzetti) , dont elle est amoureuse depuis toujours et qui a découvert son secret, elle reviendra triomphante mais jalouse, après que Bernard se soit substitué à elle pour passer une nuit d’amour avec la tsarine, qui avait un faible pour ce mystérieux chevalier.

Jacqueline Audry était une réalisatrice à une époque où seules quelques-unes - Ida Lupino aux États-Unis - ont osé marcher sur ce territoire masculin. Et ses films - quand on peut les voir - sont savoureux. Celui-ci prend bien des libertés avec l’histoire : le chevalier d’Eon était en fait un homme qui se déguisait en femme. Le personnage d’Audry est une femme, ce qui est une décision courageuse : le féminisme et la libération de la femme avant son temps sont ici, en gestation. Beaucoup d’humour, de malentendus, beaucoup de personnages historiques qui reçoivent un traitement à la Sacha Guitry, une voix ironique, beaucoup de bonne humeur. Louis XV, Madame de Pompadour (Jean Desailly et Simone Valere, mari et femme dans la vie) ) et la tsarine de Russie, tout cela dans un paysage de chocolaterie. Plaisant.

LES IMPOSTURES CONTEMPORAINES

Pour terminer mon propos, j’ai choisi deux personnage hors du temps des Lumières,

Frank Abagnale Jr.

Celui qui pouvait se faire passer pour n’importe qui. . Arnaqueur de génie, menteur, voleur, faux pilote à 16 ans, superviseur médical usurpé à 18, avocat sans diplôme, séducteur patenté, il finit par se faire prendre. Frank William Abagnale, Jr., né le 27 avril 1948, est un ancien faussaire américain, reconverti consultant en sécurité. Dans les années 1960, dès l’âge de 16 ans, il utilise des chèques falsifiés afin de voyager aux frais de la Pan American World Airways. Il voyage ainsi à travers 26 pays avant d’avoir atteint ses 19 ans. En seulement cinq années, il travaille sous huit identités différentes. Il travaille ensuite comme consultant en matière de lutte contre la fraude au sein de sa compagnie, la Abagnale and Associates.

Première escroquerie
L’un de ses premiers actes de fraudeur correspond au moment où, après l’achat d’une voiture, il persuada son père de lui prêter sa carte de crédit. Avec cette carte, il « acheta » une grande quantité de piécettes d’automobile : des pneus, des batteries, des moteurs, du carburant, etc. Ces achats n’ont existé que sur le papier, jamais en réalité. Il avait en fait conclu un accord avec un employé de la station-service. L’escroquerie fonctionnait de la façon suivante : le complice mettait les pièces d’automobile au compte du père, retirait l’argent et le partageait avec le jeune Abagnale. Le montant de la fraude s’élevait déjà à 3 400 dollars4, lorsqu’un agent de recouvrement contacta son père en personne – au moment de l’appel, Frank était en train de jeter les factures qui venaient de lui parvenir par courrier. Le coup de téléphone interrompit évidemment l’affaire. Il n’a pas été poursuivi pour ce délit.

Impostures
Pilote de ligne
La compagnie aérienne Pan American World Airways (Pan Am) estime qu’entre 16 et 18 ans, Frank Abagnale a volé sur une distance d’environ 1 000 000 kilomètres, sur près de 250 vols et à travers 26 pays, illégalement, en utilisant le deadheading : Abagnale prétendait simplement être un pilote qui devait effectuer un prochain vol à partir de la destination vers laquelle allait l’avion. Il était ainsi logé gratuitement dans les hôtels : tout était mis sur le compte de la compagnie6.

Médecin
Pendant près d’un an, il endossa le rôle de pédiatre dans un hôpital de l’État américain de Géorgie, sous le pseudonyme de Frank Williams. Il choisit de le faire après avoir failli être attrapé par la police. Sur sa demande de logement, il écrivit sous l’intitulé Ancienne activité qu’il avait été médecin. Il craignait en effet que le propriétaire ne vérifie la véracité de ses propos auprès de Pan Am s’il affirmait avoir été pilote. Après s’être lié d’amitié avec un vrai médecin qui vivait avec lui, il devint le surveillant des internes en attendant que l’hôpital trouve une autre personne pour tenir ce rôle. Il ne trouva pas ce travail très difficile : en effet il n’était chargé d’aucun travail médical à ce poste.
Cependant, Abagnale manqua d’être découvert lorsqu’il faillit laisser un bébé périr d’asphyxie : il ne comprit pas la gravité de la situation ni la signification du terme utilisé par une infirmière l’informant d’un cas de « blue baby ». Abagnale pouvait s’affranchir de la plupart de ses obligations en laissant ses internes prendre en main certains cas.

Finalement l’hôpital trouva un autre remplaçant et Abagnale retrouva sa liberté.

Avocat
Abagnale falsifia un diplôme de l’université de Harvard, passa l’examen du barreau et obtint un poste dans le cabinet du procureur général de l’État de Louisiane à l’âge de 19 ans. Il se faisait alors passer pour un copilote de Pan American World Airways.
Il dit à une hôtesse avec qui il fut brièvement marié qu’il avait étudié le droit à Harvard, et elle le présenta à un ami avocat. Ce dernier dit à Abagnale que le barreau manquait d’avocats et lui offrit la possibilité de faire sa demande. Après avoir fait un faux diplôme de l’université de Harvard, il se prépara pour l’examen préalable. En dépit d’un double échec, il déclara avoir réussi l’examen du barreau légalement après 8 semaines de révisions, et au bout de la troisième tentative. Dans sa biographie, il dit que son travail consistait d’abord à apporter du café et des livres à son employeur monsieur Drut.
Mais un véritable diplômé de Harvard l’accablait de questions à propos de sa titularisation. Naturellement, Abagnale ne pouvait répondre à des questions qui concernaient une université dans laquelle il n’était jamais allé. Il prit finalement la décision, au bout de huit mois, de préserver sa sécurité après avoir appris que l’homme soupçonneux se renseignait sur son passé.

Capture et emprisonnement
Frank Abagnale fut capturé en France en 1969 lorsqu’un employé d’Air France reconnut son visage sur une affiche de recherche. Quand la police l’interpella, douze des pays où il avait commis des fraudes réclamèrent son extradition. Après un procès de deux jours, il entra en prison pour la première fois à la maison d’arrêt de Perpignan ; une condamnation à un an de réclusion fut réduite par le juge à six mois.

Travaux légaux
Après sa libération, Abagnale essaye plusieurs emplois, dont cuisinier et projectionniste. Il est renvoyé de la plupart de ceux-ci car, à chaque fois sa carrière d’escroc était découverte par les employeurs. Il prend alors la décision de postuler dans une banque. Il raconte son passé et propose d’expliquer aux équipes les différentes méthodes utilisées par les faux-monnayeurs pour tromper la vigilance des banques.

Il fonde plus tard Abagnale & Associés, une entreprise légale de conseil et de détection des fraudes basée à Tulsa, dans l’Oklahoma. Grâce à cette entreprise, il gagne assez d’argent pour rembourser tout ce qu’il avait resquillé pendant sa première carrière.

Aujourd’hui, Abagnale est millionnaire et continue à conseiller le FBI, avec qui il est associé. Il vit à Tulsa avec la femme qu’il a épousée un an après sa reconversion. Ils ont trois enfants.

Adaptation au cinéma
On connaît l’histoire de Frank Abagnale depuis qu’elle a été adaptée par Spielberg dans « Attrape-moi si tu peux » ; mais c’est là que son parcours devient génial parce que plutôt que de croupir derrière les barreaux, Abagnale se débrouille pour se faire embaucher comme consultant par le FBI sur les affaires de fraudes. Avant de fonder une boîte qui lui rapporte. Et de devenir un genre de figure d’escroc admirée partout dans le monde.

- Du général della Rovere
Personnage de fiction remarquablement interprété par Vitorio de Sica dans un film de Rossellini. Le film est une adaptation du livre d’Indro Montanelli, publié en 1959 sous le titre « Il generale Della Rovere. Istruttoria per un processo chez Rizzoli à Milan. »

Le scénario

À Gênes en 1943, l’escroc Emanuele Bardone, qui a ses entrées à la Kommandantur, prétend être un colonel de l’armée italienne. Avec la complicité d’un officier allemand, avec qui il fait du marché noir, il extorque de l’argent aux familles de prisonniers incarcérés par les Allemands, en promettant une libération. Jusqu’au jour où une des personnes qu’il a trompées, une femme qui a appris que son mari a déjà été exécuté, le dénonce aux autorités nazies.

Capturé, il accepte, en raison de la gravité de la peine encourue, de coopérer avec l’occupant. Il est interné dans l’aile politique de la prison de San Vittore, sous l’identité du général Della Rovere, haut responsable de la Résistance, récemment abattu par les nazis. Il devra identifier un chef de la résistance, Fabrizio, que les Allemands pensent avec certitude être présent dans la prison.

Au contact de la dignité, de la générosité et de l’héroïsme de ses camarades de détention, Bardone connaît une transformation profonde qui l’amène à se comporter comme le vrai général Della Rovere. Lorsque, en représailles à l’assassinat d’un responsable de Milan, les fascistes décident d’exécuter des résistants prisonniers, il se laisse fusiller avec eux plutôt que de révéler l’identité de Fabrizio.

Le message

Même un salaud peut, en un instant, devenir un héros : c’est en substance le message véhiculé par Roberto Rossellini dans une production de commande qu’il écrit et réalise en quatre mois. Le Général della Rovere donne l’impression contraire d’une œuvre longuement mûrie, au tournage long tant chaque plan reflète la mesure, la maîtrise d’un maestro qui se refuse à la facilité de la dramatisation, des effusions. Sobre, dépouillé, sans qu’une once de manichéisme (le colonel SS y apparaît même capable de compassion, conscient de la monstruosité de ses actes) ne vienne troubler le propos, le film distille cette atmosphère glaçante, lourde de menace dont Jean-Pierre Melville imprègne quelques années plus tard son « Armée des ombres ».

Bien qu’en trente-six minutes, Dominique Maillet revient avec le documentaire Roberto Rossellini : un cinéaste insolite en quête de vérité sur Le Général della Rovere, il s’agit en fait d’un portrait plus vaste de son auteur, sujet fort des témoignages de Tinto Brass (alors son assistant), Renzo Rossellini (fils de …), Carlo Lizzani (assistant aussi, mais sur Rome, ville ouverte) et de Franco Interlenghi, comédien engagé à la dernière minute pour une puissante scène carcérale.